Ces fresques, «
c'était comme un défi lancé au geôlier de Vichy ! » À la baraque 6, par exemple, il peint une barricade d'insurgés, accompagnée de ces vers : «
Par delà les fusillades la Liberté nous attend
Saint-Sulpice - Baraque 19 - Par delà les fusillades la Liberté nous attend - Fresque
1943-1944
3 m x 5 m
© photo Germaine Chaumel, Musée de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne
, attribués à tort à Paul Vaillant-Couturier (mort le 10 octobre 1937). Ces paroles sont tirées d'une chanson révolutionnaire russe : «
Hardis camarades », écrit en 1897. En réaction au discours jugé insolent du maréchal sud-africain Smuts qui avait proclamé que la France était une nation finie, Boris entreprend de peindre «
une réponse à cette sotte affirmation.»
Ce fut
l'image d'une femme coiffée d'un bonnet phrygien, symbolisant la France
Saint-Sulpice - Baraque 18 - La Nation en marche - Fresque
1943-1944
3 m x 5 m
© photo Germaine Chaumel, Musée de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne
, jetant comme on sème les centaines de noms inscrits sur autant de feuillets, répandant sur le monde ces gloires françaises, depuis le nom de Vercingétorix, jusqu'à ceux des héros contemporains, Péri, Timbaud, Estienne d'Orves, Danielle Casanova, en passant par ceux des maréchaux de France, Joffre, Foch, Lyautey et tous les grands révolutionnaires, Robespierre, Marat, Saint-Just, les Communards ainsi que les grands écrivains, artistes, scientifiques qui jalonnent l'immense histoire de la Nation en marche continue, ininterrompue. »(8)
«
Ensuite, d'autres résistants d'obédience différente des communistes sont venus me trouver et m'ont demandé : " Est-ce que tu décoreras la chapelle ?" J'ai répondu : " Oui, bien sûr, mais à une condition : Demandez à l'aumônier de me procurer des couleurs." Et c'est ce qu'ils ont fait. L'aumônier a demandé à Monseigneur Salièges, archevêque de Toulouse, de m'envoyer cinq boîtes de peinture en bâtiment : un bleu, un rouge, un jaune, un noir, un blanc. Avec ça, j'ai décoré la baraque. »
La fresque de la chapelle
Saint-Sulpice - Fresque de la chapelle - Jésus, Marie et Joseph - Fresque
1943-1944
3 m x 3 m
© photo Germaine Chaumel, Musée de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne
représente, sur fond de ciel tricolore, l'image douloureuse d'un Christ debout devant sa croix, les mains liées, entre une vieille femme du peuple et un homme chauve et maigre en haillons et sabots qui porte sur le visage une expression d'angoisse et de pitié. Au-dessus de la tête du Christ, porteuse d'épines, se tient une colombe. Boris fait de ce Christ le symbole de l'homme résistant pour la liberté de la France, bafoué pour ses idées, solidaire des souffrances d'un peuple. «
J'ai dessiné Jésus vêtu d'une couverture avec les lettres SN (Sécurité Nationale) comme sur les vêtements des prisonniers. La couronne sur sa tête n'est pas d'épines mais de barbelés. Marie, à sa droite est une femme simple, du peuple, à sa gauche Joseph porte des loques. Le ciel était peint en tricolore. » (9)
Cette fresque fut à l'origine d'une entente plus fraternelle entre « ceux qui croyaient au ciel et ceux qui n'y croyaient pas. » L'artiste communiste avance qu'à la suite de cela, il y eut des ralliements au mouvement du Front national pour la libération de la France.
(5) Les Groupes mobiles de réserve, souvent abrégés en GMR, étaient des unités paramilitaires créées par le gouvernement de Vichy.
(6) "Le Maître de Saint-Sulpice", in Regard, n°2, février 1945.
(7) "Baraque 5", Boris Taslitzky, in La Nouvelle Critique, n°4, mars 1949, p.32.
(8) "Le Maître de Saint-Sulpice", in Faites entrer l'infini, n°17, juin 1994, p. 5.
(9) Pnina Rosenberg, L'Art des Indésirables. L'art dans les camps d'internement français 1939-1944, l'Harmattan, 2003, p. 172.
Jacky TRONEL
Lien utile : le blog de Jacky TRONEL sur la prison de Riom et le camp de Saint-Sulpice-la-Pointe.
Voir aussi le documentaire fait par la classe de 3e F du collège Pierre Suc de Saint-Sulpice.
GALERIE 
LISTE DES ŒUVRES